Un certain goût pour les mélanges
Un certain goût pour les mélanges
Une mise en scène d’images et d’objets
à la Maison Prébendale à Saint-Pol-de-Léon, dans le Finistère, en France.
Novembre 2024
Texte de présentation :
Je vis et travaille dans le Finistère Nord depuis quelques années.
Durant ces dernières décennies, en marge de mes activités artistiques d’atelier, j’ai également conçu de nombreux décors pour des spectacles de théâtre. Je considère que ce que je donne à voir à la Maison Prébendale est davantage une mise en scène de différentes réalisations que ce qu’on nomme habituellement une exposition.
La pratique d’un art n’a pas selon moi pour objectif premier de produire des œuvres abouties, mais bien plutôt de découvrir et de construire mes propres réflexions et pensées concernant ma relation au monde. C’est une recherche d’autonomie individuelle.
J’ai l’intime conviction que les pratiques artistiques et plus largement la création libre devraient être beaucoup plus présentes dans nos vies de tous les jours qu’elles ne le sont actuellement. Un artiste allemand de la mouvance Fluxus, Joseph Beuys, durant la deuxième moitié du XXe siècle, pensait que chaque personne, dans son champ d’activités propre, est artiste. Plus
précisément, il affirmait que la création n’est pas le domaine réservé des artistes, qu’elle déborde amplement de la sphère de l’art et qu’elle est consubstantielle à toutes les actions humaines.
Montrer mon travail dans le territoire où je vis, pouvoir présenter mes pratiques et en parler avec mon voisinage ainsi qu’avec tous ceux et celles que je croise dans cette vie me semble fondamental. Peut-être que cela est à mettre en lien avec mon expérience de près de trente années d’enseignement en école supérieure d’art. En tout cas j’espère ainsi être un des vecteurs qui permettront que des dialogues s’ouvrent autour de thèmes comme, entre autres, la place de l’art dans la culture, l’apprentissage des processus créatifs à l’école ou encore ce qui se passe dans l’esprit de l’artiste dans la solitude de l’atelier. Chaque personne devrait avoir la liberté de créer ce que bon lui semble là où il le souhaite, ce qui est trop rarement le cas actuellement.
Malheureusement, la rationalisation et la rentabilisation financière de toutes les activités humaines tendent à réduire l’art à une simple catégorie économique. Un artiste ne produit pas des objets de consommation et encore moins des objets de luxe. Une œuvre d’art est avant tout de la matière à penser, un véhicule visant à faire circuler les idées, ce qui ne devrait pas avoir de prix.
Le titre de cette exposition correspond à un propos central dans mon parcours personnel. Ayant constaté que tout ce qui est dans le monde est destiné à la fragmentation et que les sociétés humaines ne dérogent pas à cette loi en hiérarchisant, en discriminant, en catégorisant et bien sûr en détruisant, un concept a émergé de mon expérience que j’ai nommé
assemblages. Toutes les pièces présentées ici sont pour moi des assemblages, c’est-à-dire des résistances aux morcellements, aux dislocations, aux éparpillements et des tentatives de réarrangements à partir de restes de destruction, de dissociations ou de désagrégation.
Je fabrique mes peintures avec des œufs, des huiles et des colles végétales, je travaille avec des outils très basiques et j’utilise principalement les techniques que j’ai apprises lors de ma formation durant laquelle les ordinateurs et les téléphones mobiles n’existaient pas encore.
Pour parcourir cette exposition, il suffit de regarder les images et les objets et de laisser son imaginaire vagabonder comme bon lui semble. Les interprétations libres du visiteur ont autant d’importance que les recherches de l’artiste.
Sentier, octobre 2024